Mosquée de Kairouan
Ce vénérable sanctuaire de l'islam fut construit en
majeure partie au IXe siècle. C'est le plus ancien lieu de
prière du monde musulman occidental. La mosquée fut fondée en 669/670 par
le conquérant arabe Sidi Oqba Ben Nafi, mais, détruite sans doute par les
Berbères de Kossayla vers 688, elle dut être rebâtie vers 695 par Hassan
ben Nomane. Agrandie par le calife Hichâm, qui régnait à Damas, elle fut
reconstruite à nouveau en 774 par Yazid ibn Hâtim. La mosquée
actuellement visible résulte de la reconstruction de ce dernier sanctuaire
; celle-ci s'effectua en deux temps, d'abord, en 836, sous la direction de
l'émir aghlabide Ziyadet Allah Ier (817-838), puis en
862/863 sous l'émir Abou Ibrahim Ahmad (856-863). L'édifice fut, par la
suite, plusieurs fois restauré, notamment en 1025, en 1249 et en 1294 sous
les Hafsides.
La cour, les portiques et le minaret
De dimensions monumentales, la cour, à laquelle on accède
par la porte dite Bab el-Maa (la Porte de l'Eau), qui date de 1294,
est dallée en marbre blanc ; elle est délimitée par des portiques
construits par l'émir Abou Ibrahim Ahmad, au IXe siècle,
puis complétés sous les Hafsides, à la fin du XIIIe siècle.
Les Turcs, au XVIIe siècle, remanièrent le portique Ouest.
Au milieu du portique nord s'élève le minaret, élevé
en 836, sous Ziyadet Allah Ier ou peut-être au début du
VIIIe siècle. Trapu et massif, il avait un rôle défensif.
Haut de 35 m, il comporte trois étages de plan carré, en retrait les
uns sur les autres et bordés de parapets crénelés ; le dernier étage,
couronné d'une coupole, est considéré comme une addition d'époque
hafside (fin du XIIIe s.).
La porte de Lalla Rihana et la salle de prière
La porte de Lalla Rihana, qui permet d'accéder à
la salle de prière, est la plus belle de la mosquée. Percée dans un petit
édicule délicatement décoré, auquel on a donné le nom d'une sainte
femme enterrée à proximité, elle date de l'époque hafside (1294). L'édicule,
couvert d'une coupole à cannelures rayonnantes sur trompes en cul-de-four,
est couronné par une frise d'arcs aveugles outrepassés, surmontés d'un crénelage
de merlons en dents de scie. Sa façade présente un grand arc en plein
cintre outrepassé, reposant par l'intermédiaire d'impostes sur des
colonnes antiques qui flanquent également les angles du monument. Les côtés
sont percés de portes moins importantes avec arcades également outrepassées
reposant directement sur les colonnes. Les arcs d'intrados sont décorés
d'arabesques en plâtre dont les motifs s'inspirent d'éléments végétaux
et géométriques.
La salle de prière
Vers la cour, la façade de la salle de prière est bordée
d'un ancien portique élevé par Ziyadet Allah Ier au IXe siècle,
dont il subsiste quelques vestiges de la décoration.
La salle de prière offre un ensemble d'une majesté
imposante, avec une forêt de colonnes en marbre blanc, reprises de
monuments romains ou byzantins.
La nef médiane, entre deux alignements de colonnes jumelées,
est plus large que les autres. Une nef perpendiculaire de même largeur
longe le mur du fond. Les arcs outrepassés se raccordent avec les colonnes
par l'intermédiaire d'une corniche, parfois sculptée, d'une imposte maçonnée
et d'un sommier sculpté reposant sur le chapiteau. Ces colonnes et
chapiteaux proviennent, pour la plupart, de l'antique Hadrumète et même,
à deux exceptions près, de Carthage ; deux colonnes où des inscriptions
coufiques sont gravées en relief, sont d'époque aghlabide, ainsi qu'un
chapiteau à feuilles d'acanthe retournées comme par un coup de vent. Deux
colonnes de la travée centrale sont des monolithes de porphyre rouge.
En avant du mihrab se trouve une coupole côtelée sur
trompes en coquille, reconstruite en 836 sous Ziyadet Allah Ier.
La calotte, creusée de vingt-quatre cannelures, repose sur un tambour
circulaire percé de huit fenêtres entre lesquelles s'interposent seize
niches groupées deux par deux. À l'extérieur, le dôme côtelé de
godrons repose sur un massif octogonal aux pans légèrement concaves. La
base carrée est ornée de niches. Une autre coupole constitue le motif
central de la façade de la salle de prière.
Le mihrab
Le mihrab est entouré par cent trente admirables plaques
de faïence à reflets métalliques importés de Bagdad au IXe siècle.
Le fond du mihrab est décoré de panneaux de marbre sculpté, dont
plusieurs sont ajourés et séparés de bandes portant des inscriptions et
des motifs floraux. Quelques-uns sont décorés d'une niche à coquille en
bas-relief très plat qui fait penser à certains ivoires byzantins.
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